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Cerceau 3 du Plan d’action autochtone 2025-2030, avec des formes abstraites de tons terreux sur un arrière-plan texturé.
L’environnement physique conditionne l’état d’esprit – à savoir si l’on s’y sent ou non à sa place, en sécurité et visible. Pour les Autochtones, il existe un lien de longue date entre les espaces institutionnels et un lourd bagage de préjudices. Des séquelles laissées par les pensionnats à l’exclusion systémique qui perdure encore, ces lieux sont rarement neutres. « C’est inscrit dans notre mémoire du sang », explique Tareyn Johnson, directrice du Bureau des affaires autochtones à l’Université d’Ottawa.

Le troisième cerceau du Plan d’action autochtone 2025-2030 de l’Université vise la transformation des espaces physiques pour les membres autochtones et allochtones de la communauté. Il préconise des changements visibles, tangibles et symboliques de l’environnement physique pour affirmer que l’établissement se situe sur le territoire traditionnel non cédé de la Nation algonquine et faire voir, ressentir et respecter la présence autochtone. 

Des initiatives artistiques, architecturales, linguistiques, culinaires et botaniques invitent ainsi à l’interaction avec les visions du monde autochtones. Elles nous rappellent à qui appartiennent les terres que nous arpentons et ce que signifie leur partage authentique.

Cet article poursuit notre série sur le nouveau Plan d’action autochtone de l’Université d’Ottawa, qui explore tour à tour chacun des cerceaux.

Pour la visibilité de la présence autochtone sur le campus

Les changements amenés par le troisième cerceau transforment déjà les interactions des gens avec l’espace. Les langues autochtones font leur apparition sur les panneaux des bâtiments, et une politique a été proposée pour promouvoir l’affichage trilingue (algonquin, français et anglais) sur le campus. Des endroits emblématiques du campus arborent des fresques et des œuvres d’art spécialement commandées, dont une sculpture de David General devant le pavillon administratif principal. Les espaces extérieurs ont été renommés, les panneaux de bienvenue ont été modifiés, et les drapeaux des Nations algonquines ont été levés lors de grands événements. La Grande Allée, un chemin pédestre qui traverse le campus, portera aussi le nom algonquin Kichi Mìkàns.

« Ces changements s’inscrivent dans ce que j’appelle l’interaction passive, explique Tareyn Johnson. Il n’est pas nécessaire de participer ou de s’inscrire à quoi que ce soit pour s’imprégner des visions du monde autochtones; il suffit de se balader sur le campus. Cette exposition au quotidien est enrichissante. »

Tareyn Johnson

« Pour s’imprégner des visions du monde autochtones; il suffit de se balader sur le campus. Cette exposition au quotidien est enrichissante. Â»

Tareyn Johnson

— Directrice du Bureau des affaires autochtones à l’Université d’Ottawa

Ces affirmations de l’expression autochtone ont un objectif double : elles apportent de la reconnaissance et du soutien à la population étudiante et au personnel autochtones, tout en encourageant la communauté universitaire dans son ensemble à s’intéresser à l’histoire du territoire et à prendre conscience de l’importance de ce dernier. Pour beaucoup, la transformation de l’espace a remis en question la soi-disant neutralité de l’architecture institutionnelle.

Des politiques et des procédures pour intégrer la présence autochtone

Les changements physiques sur le campus sont le fruit de politiques réfléchies et de collaborations à long terme. L’Université dispose d’une nouvelle politique en matière d’infrastructure qui garantit la participation autochtone tout au long du processus. Du tout début de la planification jusqu’à la mise en œuvre, le Service des immeubles travaille avec des architectes, des créateurs et créatrices et des gardiennes et gardiens du savoir autochtones.

« À présent, nous avons un modèle proactif, se réjouit la directrice des affaires autochtones. Les perspectives autochtones ne sont plus simplement recueillies après la phase de conception. Elles contribuent à former la vision dès le départ. »

Cette approche permet d’assurer la continuité, même quand les équipes ou la direction changent. Elle renforce également les capacités à long terme au sein de l’Université. L’équipe des Immeubles a été formée aux principes de conception autochtones, tandis que le Bureau des affaires autochtones est consulté pour chaque projet majeur de construction ou de rénovation.

Chaque initiative est menée par une équipe d’architectes, de spécialistes du design, de membres du personnel et de consultantes et consultants ayant pour beaucoup des racines autochtones ou un vécu pertinent et des liens étroits avec la communauté. Les efforts collectifs transforment non seulement les locaux, mais aussi le sens que l’Université d’Ottawa donne à l’accueil et à l’inclusivité.

La cuisine autochtone, une expression de l’identité

La nourriture ne comble pas uniquement un besoin physique : elle est aussi le véhicule d’histoires, de souvenirs et de connexion avec le territoire. L’intégration progressive de la cuisine autochtone à l’Université d’Ottawa est une autre manifestation de l’objectif global du troisième cerceau : intégrer les visions du monde autochtones au quotidien.

De plus en plus d’aliments traditionnels, comme le bison et le riz sauvage, sont régulièrement au menu. « Il s’agit d’intégrer les habitudes alimentaires autochtones au quotidien de la population étudiante, du personnel et du corps professoral, rapporte Tareyn Johnson. Pas de programme spécial sur inscription; il suffit d’être là. »

Ces transformations montrent qu’une approche intentionnelle et réfléchie des espaces physiques permet d’honorer l’identité, la culture et les connaissances des Autochtones, et ainsi de renforcer le sentiment d’appartenance dans les expériences du quotidien. Alors que cette démarche se poursuit, le troisième cerceau nous rappelle que des changements concrets bourgeonnent déjà autour de nous.